LES POEMES DE BABEL


Ἰθάκη / ITHAQUE

Constantin Cavafy (1863-1933)

Τοὺς Λαιστρυγόνας καὶ τοὺς Κύκλωπας,
τὸν θυμωμένο Ποσειδῶνα μὴ φοβᾶσαι,
τέτοια στὸν δρόμο σου ποτέ σου δὲν θὰ βρεῖς,
ἂν μέν᾿ ἡ σκέψις σου ὑψηλή, ἂν ἐκλεκτὴ
συγκίνησις τὸ πνεῦμα καὶ τὸ σῶμα σου ἀγγίζει.

Τοὺς Λαιστρυγόνας καὶ τοὺς Κύκλωπας,
τὸν ἄγριο Ποσειδώνα δὲν θὰ συναντήσεις,
ἂν δὲν τοὺς κουβανεῖς μὲς στὴν ψυχή σου,
ἂν ἡ ψυχή σου δὲν τοὺς στήνει ἐμπρός σου.

Νὰ εὔχεσαι νά ῾ναι μακρὺς ὁ δρόμος.
Πολλὰ τὰ καλοκαιρινὰ πρωϊὰ νὰ εἶναι
ποὺ μὲ τί εὐχαρίστηση, μὲ τί χαρὰ
θὰ μπαίνεις σὲ λιμένας πρωτοειδωμένους·

νὰ σταματήσεις σ᾿ ἐμπορεῖα Φοινικικά,
καὶ τὲς καλὲς πραγμάτειες ν᾿ ἀποκτήσεις,
σεντέφια καὶ κοράλλια, κεχριμπάρια κ᾿ ἔβενους,
καὶ ἡδονικὰ μυρωδικὰ κάθε λογῆς,
ὅσο μπορεῖς πιὸ ἄφθονα ἡδονικὰ μυρωδικά.

Σὲ πόλεις Αἰγυπτιακὲς πολλὲς νὰ πᾷς,
νὰ μάθεις καὶ νὰ μάθεις ἀπ᾿ τοὺς σπουδασμένους.
Πάντα στὸ νοῦ σου νἄχῃς τὴν Ἰθάκη.
Τὸ φθάσιμον ἐκεῖ εἶν᾿ ὁ προορισμός σου.

Ἀλλὰ μὴ βιάζῃς τὸ ταξείδι διόλου.
Καλλίτερα χρόνια πολλὰ νὰ διαρκέσει.
Καὶ γέρος πιὰ ν᾿ ἀράξῃς στὸ νησί,
πλούσιος μὲ ὅσα κέρδισες στὸν δρόμο,
μὴ προσδοκώντας πλούτη νὰ σὲ δώσῃ ἡ Ἰθάκη.

Ἡ Ἰθάκη σ᾿ ἔδωσε τ᾿ ὡραῖο ταξίδι.
Χωρὶς αὐτὴν δὲν θἄβγαινες στὸν δρόμο.
Ἄλλα δὲν ἔχει νὰ σὲ δώσει πιά.

Κι ἂν πτωχικὴ τὴν βρῇς, ἡ Ἰθάκη δὲν σὲ γέλασε.
Ἔτσι σοφὸς ποὺ ἔγινες, μὲ τόση πείρα,
ἤδη θὰ τὸ κατάλαβες ᾑ Ἰθάκες τί σημαίνουν.

Quand tu partiras pour Ithaque,
souhaite que le chemin soit long,
riche en péripéties et en expériences.

Ne crains ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni la colère de Neptune.
Tu ne verras rien de pareil sur ta route si tes pensées restent hautes, s
i ton corps et ton âme ne se laissent effleurer
que par des émotions sans bassesse.

Tu ne rencontreras ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni le farouche Neptune,
si tu ne les portes pas en toi-même,
si ton cœur ne les dresse pas devant toi.

Souhaite que le chemin soit long,
que nombreux soient les matins d'été,
où (avec quelles délices !) tu pénètreras
dans des ports vus pour la première fois.

Fais escale à des comptoirs phéniciens,
et acquiers de belles marchandises :
nacre et corail, ambre et ébène,
et mille sortes d'entêtants parfums.
Acquiers le plus possible de ces entêtants parfums.

Visite de nombreuses cités égyptiennes,
et instruis-toi avidement auprès de leurs sages.
Garde sans cesse Ithaque présente à ton esprit.
Ton but final est d'y parvenir,

mais n'écourte pas ton voyage :
mieux vaut qu'il dure de longues années,
et que tu abordes enfin dans ton île aux jours de ta vieillesse,
riche de tout ce que tu as gagné en chemin,
sans attendre qu'Ithaque t'enrichisse.

Ithaque t'a donné le beau voyage :
sans elle, tu ne te serais pas mis en route.
Elle n'a plus rien d'autre à te donner.

Même si tu la trouves pauvre, Ithaque ne t'a pas trompé.
Sage comme tu l'es devenu à la suite de tant d'expériences,
tu as enfin compris ce que signifient les Ithaques.

Ἰθάκη dit par Elli Lampeti (1926-1983), actrice de théâtre et de cinéma.


DIE BEIDEN / LES DEUX

Hugo von Hofmannsthal (1874-1929)

Sie trug den Becher in der Hand
- Ihr Kinn und Mund glich seinem Rand -,
So leicht und sicher war ihr Gang,
Kein Tropfen aus dem Becher sprang.

So leicht und fest war seine Hand:
Er ritt auf einem jungen Pferde,
Und mit nachlässiger Gebärde
Erzwang er, daß es zitternd stand.

Jedoch, wenn er aus ihrer Hand
Den leichten Becher nehmen sollte,

So war es beiden allzu schwer: 
Denn beide bebten sie so sehr, 
Daß keine Hand die andre fand 
Und dunkler Wein am Boden rollte

.

Elle portait la tasse dans sa main
- son menton et sa bouche ressemblaient à son bord -,
Sa marche était si facile et sûre,
Pas une goutte n'a sauté de la tasse.

Sa main était si légère et ferme:
Il monta sur un jeune cheval
et, avec des gestes imprudents,
il le fit trembler.

Cependant, quand il est hors de votre main
Devrait prendre la tasse légère
C'était donc trop difficile
pour les deux : car les deux tremblaient tellement
qu'aucune main ne pouvait trouver l'autre
et du vin noir roulé sur le sol.

Die Beiden dit par Fritz Stavenhagen (1945) Schauspieler, Sprecher und Regisseur.

ANOCHE CUANDO DORMIA / HIER SOIR, EN DORMANT

Antonio Machado (1875-1939)

Anoche cuando dormía
soñé, ¡bendita ilusión!,
que una fontana fluía
dentro de mi corazón.

Di, ¿por qué  acequia escondida,
agua, vienes hasta mí,
manantial de nueva vida
de donde nunca bebí?

Anoche cuando dormía
soñé, ¡bendita ilusión!,
que una colmena tenía
dentro de mi corazón;

y las doradas abejas
iban fabricando en él,
con las amarguras viejas,
blanca cera y dulce miel.

Anoche cuando dormía
soñé, ¡bendita ilusión!,
que un ardiente sol lucía
dentro de mi corazón.

Era ardiente porque daba
calores de rojo hogar,
y era sol porque alumbraba
y porque hacía llorar.

Anoche cuando dormía
soñé, ¡bendita ilusión!,
que era Dios lo que tenía
dentro de mi corazón.

Hier soir, en dormant,
j’ai rêvé, illusion bénie!
Que coulait une fontaine
dans mon cœur

Dis-moi, pourquoi, filet caché,
eau, viens-tu jusqu’à moi,
source de vie nouvelle
d’où je n’ai jamais bu?

Hier soir, en dormant,
j’ai rêvé, illusion bénie!
Que dans mon cœur
j’avais une ruche;

et que les abeilles dorées
y faisaient
avec mes vieilles amertumes
cire blanche et doux miel.

Hier soir, en dormant,
j’ai rêvé, illusion bénie!
qu’en mon cœur
luisait un soleil brûlant.

Il était brûlant, car il donnait
une chaleur de brasier rouge,
et c’était un soleil parce qu’il éclairait
et faisait pleurer.

Hier soir, en dormant,
j’ai rêvé, illusion bénie!
que c’était Dieu
que j’avais dans mon cœur.

Anoche cuando dormia dit par José Luis Gomez (né en 1940), acteur et metteur en scène, Formé à l'école de Jacques  Lecoq, puis enAllemagneet àNew YorkavecLee Strasberg, il a été co-directeur du Centro Dramático Nacional (théâtre nacional d'Espagne) de 1978 à 1981, puis directeur duthéâtre EspañoldeMadrid.


ABENDLAND / OCCIDENT

Georg Trakl (1887-1914)

großen Städte
Steinern aufgebaut
In der Ebene !
So sprachlos folgt
Der Heimatlose
Mit dunkler Stirne dem Wind,
Kahlen Bäumen am Hügel.
Ihr weithin dämmernden Ströme !
Gewaltig ängstet
Schaurige Abendröte
Im Sturmgewölk.
Ihr sterbenden Völker !
Bleiche Woge
Zerschellend am Strande der Nacht,
Fallende Sterne 

Ô grandes villes
Bâties de pierre
dans la plaine !
Avec quel mutisme il suit
Le vent, l’apatride
Au front sombre,
Et les arbres dépouillés sur la colline.
Ô fleuves s’enténébrant au loin !
Angoissant
L’atroce soleil couchant
Dans la nuée d’orage.
Ô peuples qui meurent !
Vague blême
Qui se brise sur la grève de la nuit
Chute d’étoiles


ME ZO GANET E KREIZ AR MOR / JE SUIS NE AU MILIEU DE LA MER

Jean-Pierre Calloc'h (1888-1917)

Me zo ganet e-kreiz ar mor
Teir leo er-maez ;
Un tiig gwenn du-hont am eus,
Ar banal 'gresk e-tal an nor
Hag al lann a c'hol' an avaez.
Me zo ganet e-kreiz ar mor
E bro Arvor.

Ma zad a oa 'el e dadoų,
Ur martolod ;
Bevet en deus kuzh ha diglod
- Ar paour ne gan den e glodoų -
Bemdez-bemnoz ār ar mor blot.
Ma zad a oa 'el e dadoų
Stlejour rouedoų.

Ma mamm ivez a labour(a)
- Ha gwenn he bleo -
Ganti ar c'hwez ār hon taloų,
Desket em eus, bihanik tra,
Medi ha tenni avaloų.
Ma mamm ivez a labour(a)
D'ounit bara.

O deizioų mam bugaleerezh
Pand aen, dilu(i)
Gant mamm da redek an irvi
Pe gant ma zad d'ar beskerezh
Men ez oc'h-c'hwi ?
O deizioų mam bugaleerezh
Na dous e oac'h!

C'hwec'h 'oamp neuze, santez Mari,
Ar-dro d'an daol;
Yac'h ha laouen e vevemp holl.
Da Zoue ha deoc'h e tougemp bri.
Bremah ema kemmet an taol.
C'hwec'h 'oamp neuze, santez Mari :
N'omp mui 'met tri...

Ar Maro ār an nor 'n deus stoket,
Deuet eo a-barzh :
Hon eurvad zo aet kuit 'n un arc'h
Er vered parrez da gousket...
Hag ennon e c'hanas ur barzh.
Maro ār an nor 'n deus stoket...
Ne ouelin ket!

Ne ouelin ket! Re 'm eus gouelet
Neuze, siwazh!
Ha c'hoant em behe d'ober c'hoazh,
D'ar glac'har zo tro da'm oaled!
Met ret eo bout kreņv e'it arc'hoazh.
Ne ouelin ket! Re 'm eus gouelet :
Eurioų kollet.

Daroų a zic'hoanag divent
Em eus taolet
En devezhioų-hont ken kalet;
Ra viot benniget 'elkent,
Rak roet ho peus din ar Gweled!
Daeroų a zic'hoanag divent
Ma amzer gent!...

Ha bremaņ petra 'lârin-me,
Pa oarit holl?
Ma eurvad douarel aet da goll,
Bet on er c'hloerdi, en arme,
Baleet 'm eus e-dan Ho Heol.
Ha bremaņ petra 'lârin-me
Dirak man Doue ?

Petra 'lârin Deoc'h, o Doue strizh,
Mor madelezh?
Ar baourentez zo c'hwerv he laezh;
Ar bleuņv disec'het 'c'houlenn gwlizh;
An douar-maņ zo lous he follezh.
Petra 'lârin Deoc'h, o Doue strizh,
'Met ez on skuizh!

Deuet on davedoc'h arselin;
Doc'h Hoc'h aoter
E klaskan dibun ma fater :
Sklaerderait-me hag e welin,
Komzit, ma taņvain Ho touster.
Deuet on davedoc'h arselin
Ar man daoulin...



En pleine mer où je suis né
Trois lieues au large.
J'ai ma fruste et blanche maison
L'alentour est couvert d'ajonc
Sur le seuil pousse le genet
En pleine mer où je suis né,
Un fils d'Armor.

Mon père, comme ses aïeux,
Etait marin;
Une vie sans gloire et obscure
-La gloire, un pauvre n'en a cure-
Nuit et jour sur l'océan bleu
Père fut comme ses aïeux
Traîne-filets.

Ma mère travaille elle aussi
-Malgré son âge-
D'elle, à la sueur de nos fronts
J'ai appris, tout petit garçon,
A glaner et tirer les fruits.
Ma mère travaille elle aussi
Pour se nourrir.

O, jours bénis de mon enfance
Où sans entrave
De ma mère dans les sillons
De mon père près du poisson
Je goûtais la chère présence,
O, jours bénis de mon enfance,
Pleins de douceur!

Nous étions six, Sainte Marie,
Assis à table:
Tous nous étions sains et heureux.
Te portant respect, comme à Dieu.
La table a changé, aujourd'hui.
Nous étions six, Sainte Marie.
Nous sommes trois...

A la porte a frappé la mort
Elle est entrée;
Notre bonheur dans un cercueil
Partit dormir au champ du deuil...
0ù un barde chantait encor
A la porte a frappé la mort...
Assez de pleurs!

Assez de pleurs! Ils étaient vains
Alors, déjà:
Et je voudrais faire une place
Au chagrin autour de mon âtre?
Il faut être fort pour demain.
Assez pleuré! Ces pleurs sont vains:
Du temps perdu!

Les pleurs d'immense désespoir
Que j'ai versés
Au cours des épreuves amères
Qu'ils soient bénis, bien au contraire:
Car sans eux je ne pourrais voir!
Ces pleurs d'immense désespoir.
C'était avant!...

Et maintenant que vous dirai-je?
Vous savez tout!
Mon bonheur terrestre effacé.
Le séminaire, puis l'armée,
J'ai marché sous Votre soleil
Et maintenant que vous dirai-je,
A Vous, mon Dieu?

Que Vous dirai-je, Dieu sévère,
Mer de bonté?
Qu'il est aigre le lait du pauvre;
Que sans rosée sèche la rose;
Que sa folie salit la terre.
Que dire d'autre, Dieu sévère?
Que je suis las!

Je viens vers Vous prendre serein.
A votre autel
Je veux réciter mon pater.
Je verrai, si mon Dieu m'éclaire.
Parlez, Votre douceur m'étreint.
Je suis venu prendre serein
M'agenouiller...

Me zo ganet e kreiz ar mor chanté par Anne Davodeau.

BURNT NORTON

Thomas Stearns Eliot (1888-1965)

Time present and time past
Are both perhaps present in time future,
And time future contained in time past.
If all time is eternally present
All time is unredeemable.
What might have been is an abstraction
Remaining a perpetual possibility
Only in a world of speculation.
What might have been and what has been
Point to one end, which is always present.
Footfalls echo in the memory
Down the passage which we did not take
Towards the door we never opened
Into the rose-garden. My words echo
Thus, in your mind.
But to what purpose
Disturbing the dust on a bowl of rose-leaves
I do not know.
Other echoes
Inhabit the garden. Shall we follow?
Quick, said the bird, find them, find them,
Round the corner. Through the first gate,
Into our first world, shall we follow
The deception of the thrush? Into our first world.
There they were, dignified, invisible,
Moving without pressure, over the dead leaves,
In the autumn heat, through the vibrant air,
And the bird called, in response to
The unheard music hidden in the shrubbery,
And the unseen eyebeam crossed, for the roses
Had the look of flowers that are looked at.
There they were as our guests, accepted and accepting.
So we moved, and they, in a formal pattern,
Along the empty alley, into the box circle,
To look down into the drained pool.
Dry the pool, dry concrete, brown edged,
And the pool was filled with water out of sunlight,
And the lotos rose, quietly, quietly,
The surface glittered out of heart of light,
And they were behind us, reflected in the pool.
Then a cloud passed, and the pool was empty.
Go, said the bird, for the leaves were full of children,
Hidden excitedly, containing laughter.
Go, go, go, said the bird: human kind
Cannot bear very much reality.
Time past and time future
What might have been and what has been
Point to one end, which is always present.

 

Le temps présent et le temps passé
sont tous deux présents peut-être dans le temps futur
et le temps futur contenu dans le temps passé.
Si tout temps est éternellement présent
tout temps est irrémissible.
Ce qui aurait pu être est une abstraction
qui ne demeure un perpétuel possible
que dans un monde de spéculation.
Ce qui aurait pu être et ce qui a été
tendent vers une seule fin, qui est toujours présente.
Des pas résonnent en écho dans la mémoire
le long du corridor que nous n’avons pas pris
vers la porte que nous n’avons jamais ouverte
sur le jardin de roses. Mes paroles font écho
ainsi, dans votre esprit.
Mais à quelle fin
troublent-elles la poussière d’une coupe de roses,
qu’en sais-je ?
D’autres échos
habitent le jardin. Les suivrons-nous ?
Vite, dit l’oiseau, vite, trouve-les, trouve-les
au détour de l’allée. Par le premier portail,
dans notre premier monde, allons-nous suivre
le leurre de la grive ? Dans notre premier monde,
ils étaient là, dignes et invisibles,
se mouvant sans peser parmi les feuilles mortes,
dans la chaleur d’automne, à travers l’air vibrant,
et l’oiseau d’appeler, en réponse
à la musique inentendue dissimulée dans le bosquet,
et le regard inaperçu franchit l’espace, car les roses
avaient l’air de fleurs regardées.
Ils étaient là : nos hôtes acceptés, acceptants.
Et nous procédâmes avec eux en cérémonieuse ordonnance,
le long de l’allée vide et dans le rond du buis,
pour plonger nos regards dans le bassin tari.
Sec le bassin, de ciment sec, au rebord brun,
et le bassin fut rempli d’eau par la lumière du soleil,
et les lotus montèrent doucement, doucement,
la surface scintilla au cœur de la lumière,
et ils étaient derrière nous, se reflétant dans le bassin.
Puis un nuage passa et le bassin fut vide.
Va, dit l’oiseau — les feuilles étaient pleines d’enfants
excités, réprimant leurs rires dans leurs cachettes.
Va, va, va, dit l’oiseau : le genre humain
ne peut pas supporter trop de réalité.
Le temps passé, le temps futur,
ce qui aurait pu être et ce qui a été
tendent vers une seule fin, qui est toujours présente.

Burnt Norton dit par Alec Guinesse (1914-2000), acteur de théâtre et de cinéma.  Son interprétation du colonel Nicholson dans Le Pont de la rivière Kwaï (1957) est récompensée par un Oscar et un Golden Globe. Il est également connu, entre autres, pour son rôle d'Obi-Wan Kenobi âgé dans la saga Star Wars.

Февраль / FÉVRIER

Boris Pasternak (1890-1960)

Февраль. Достать чернил и плакать!
Писать о феврале навзрыд,
Пока грохочущая слякоть
Весною черною горит.

Достать пролетку. За шесть гривен,
Чрез благовест, чрез клик колес,
Перенестись туда, где ливень
Еще шумней чернил и слез.

Где, как обугленные груши,
С деревьев тысячи грачей
Сорвутся в лужи и обрушат
Сухую грусть на дно очей.

Под ней проталины чернеют,
И ветер криками изрыт,
И чем случайней, тем вернее
Слагаются стихи навзрыд.

.

Février. De l’encre et des larmes !
Dire à grands sanglots février
Tant que la boue et le vacarme
En printemps noir viennent flamber.

Prendre un fiacre. Et pour quelques sous
Passant carillons et rumeurs,
Aller où l’averse à tout coup
Éteint le bruit d’encre et de pleurs.

Où, tels des poires qu’on calcine,
S’abattent des milliers de freux
Dans les flaques, jetant un spleen
Stérile et sec au fond des yeux.

Le vent est labouré de cris,
La neige fond en noirs îlots ;
Et plus les vers seront fortuits,
Mieux ils naîtront à grands sanglots.

Février dit par Sergeï Jurassic (né en 1935).


Лиличка! - Вместо письма / LILICHKA ! AU LIEU D’ÉCRIRE

Vladimir Maïakovski (1890-1930)

Дым табачный воздух выел.

Комната – глава в крученыховском аде.

Вспомни – за этим окном впервые

Руки твои, исступленный, гладил.

 

Сегодня сидишь вот, сердце в железе.

День еще – выгонишь, можешь быть, изругав.

В мутной передней долго не влезет

Сломанная дрожью рука в рукав.

 

Выбегу, тело в улицу брошу я.

Дикий, обезумлюсь, отчаяньем иссечась.

Не надо этого, дорогая, хорошая,

Давай простимся сейчас.

 

Все равно любовь моя – тяжкая гиря ведь,

Висит на тебе, куда ни бежала б.

Дай хоть в последнем крике выреветь

Горечь обиженных жалоб.

 

Если быка трудом уморят -

Он уйдет, разляжется в холодных водах.

Кроме любви твоей мне нету моря,

А у любви твоей и плачем не вымолишь отдых.

 

Захочет покоя уставший слон -

Царственный ляжет в опожаренном песке.

Кроме любви твоей, мне нету солнца,

А я и не знаю, где ты и с кем.

 

Если б так поэта измучила,

Он любимую на деньги б и славу выменял,

А мне ни один не радостен звон,

кроме звона твоего любимого имени.

 

И в пролет не брошусь, и не выпью яда,

И курок не смогу над виском нажать.

Надо мною, кроме твоего взгляда,

Не властно лезвие ни одного ножа.

 

Завтра забудешь, что тебя короновал,

Что душу цветущую любовью выжег,

И суетных дней взметенный карнавал

Растреплет страницы моих книжек...

 

Слов моих сухие листья ли

Заставят остановиться, жадно дыша?

Дай хоть последней нежностью выстелить

Твой уходящий шаг.

La fumée de tabac a consommé l'air.
La pièce
est un chapitre de l'enfer de Kruchenykh.
Rappelez-vous -
au - delà de cette fenêtre
dans une frénésie,
j'ai d'abord caressé vos mains.
Vous êtes assis ici aujourd'hui
avec un cœur en fer.
Un jour de plus,
tu me jetteras
peut-être en jurant.
Dans le hall sombre, mon bras,
brisé par le tremblement, ne rentre pas tout de suite dans ma manche.
Je vais m'enfuir,
jeter mon corps dans la rue.
Je vais me délecter,
sauvage, fou
de désespoir.
Ne laissez pas cela arriver
mon cher,
mon chéri,
laissez-nous maintenant.
Après tout
mon amour
est un poids lourd
accroché à vous,
peu importe où vous allez.
Laissez-moi beugler un dernier cri
de grief amer et blessé.
Si vous conduisez un taureau à l'épuisement,
il s'enfuira,
couchez-vous dans les eaux froides.
Outre votre amour,
je n'ai
pas d'océan
et votre amour n'accordera même pas un appel aux larmes pour le repos.
Quand un éléphant fatigué veut la paix,
il se couche royalement dans le sable brûlant.
Outre ton amour,
je n'ai
pas de soleil,
mais je ne sais même pas où tu es et avec qui.
Si vous torturiez un poète comme celui-ci,
il
réprimanderait sa bien-aimée pour de l'argent et de la gloire,
mais pour moi,
aucun son n'est joyeux
mais le son de ton nom bien-aimé.
Je ne me jetterai pas en bas
ou ne boirai
pas de poison et je ne pourrai pas mettre un pistolet sur ma tête.
Aucune lame ne
me tient figée
mais ton regard.
Demain tu oublieras
que je t'ai couronné,
que j'ai brûlé mon âme fleurie d'amour,
et le carnaval tourbillonnant des jours insignifiants
ébouriffera les pages de mes livres ... Les
feuilles sèches de mes mots
te forceraient-elles à arrêter de
haleter pour l'air?

Permettez-moi au moins de
paver avec un attachement d'adieu
votre chemin de retraite.

Montage sonore de Lilichka ! Au lieu d'écrire !

LA SOLEA / LA SOLEA

Federico Garcia Lorca (1898-1936)

Vêtue de voiles noirs,
elle pense que le monde est bien petit
et le coeur immense
Vêtue de voiles noirs.
Elle pense que le tendre soupir,
le cri, disparaissent
au fil du vent.
Vêtue de voiles noirs.
Elle avait laissé sa fenêtre ouverte
et à l'aube par la fenêtre
tout le ciel a débouché.
Ah!
Vêtue de voiles noirs!

Vestida con mantos negros.
piensa que el mundo es chiquito
y el corazón es inmenso.
Vestida con mantos negros
Piensa que el suspiro tierno
y el grito, desaparecen
en la corriente del viento.
Vestida con mantos negros
Se dejó el balcón abierto
y al alba por el balcón
desembocó todo el cielo.
¡Ay ayayayay,
que vestida con mantos negros!

La Solea chnaté par Marta Gomez (née en 1978), auteure-compositrice-interprète.

LA MAMADRE / LA MERE

Pablo Neruda (1904-1973)

La mamadre viene por ahí,
con zuecos de madera,
anoche
sopló el viento del polo,
se rompieron los tejados,
se cayeron los muros y los puentes,
aulló la noche entera con sus pumas.
Y ahora,
en la mañana de sol helado, llega
mi mamadre Doña
Trinidad Marverde,
dulce como la tímida frescura
del sol en las regiones tempestuosas,
lamparita
menuda y apagándose
encendiéndose
para que todos vean el camino.

¡Oh ! Dulce mamadre
- -nunca pude
decir madrastra-
ahora
mi boca tiembla al definirte
porque apenas
abrí el entendimiento
vi la bondad vestida de pobre trapo oscuro,
la santidad más útil ;
la del agua y de la harina,
y esto fuiste : la vida te hizo pan ;
y allí te consumimos,
invierno largo a invierno desolado
con las goteras dentro
de la casa
y tu humildad ubicua,
desgranando
el áspero cereal de la pobreza
como si hubieras ido
repartiendo
un río de diamantes.

¡ Ay ! Mamá ¿ cómo pude
vivir sinrecordarte
cada minuto mío ?
No es posible. Yo llevo
tu Marverde en mi sangre,
el apellido del pan que se reparte,
de aquellasdulces manos
que cortaron del saco de la harina
los calzoncillos de mi infancia,
de la que cocinó, planchó, lavó,
sembró, calmó la fiebre,
y cuando todo estuvo hecho,
y ya podía yo
sostenerme con los pies seguros,
se fue
cumplida, oscura,
al pequeño ataud
donde por primera vez estuvo ociosa
bajo la dura lluvia de Temuco.


La mère revient,
avec des sabots en bois,
la nuit dernière
le vent du pôle a soufflé,
les toits se sont cassés,
les murs et les ponts sont tombés, elle a
hurlé toute la nuit avec ses pumas.
Et maintenant,
le matin du soleil froid,
ma mère Doña
Trinidad marverde arrive,
doux comme la fraîcheur timide
du soleil dans les régions orageuses, une
petite
veilleuse et éteindre, tourner
sur
afin que chacun puisse voir la manière.

Oh Douce mère
- - je ne pourrais jamais
dire belle-mère -
maintenant
ma bouche tremble en te définissant
parce que dès que
j'ai ouvert ma compréhension,
j'ai vu la bonté vêtue d'un pauvre tissu sombre,
la sainteté la plus utile;
celle de l'eau et de la farine,
et vous y étiez: la vie vous a fait du pain;
et là, nous vous consumons,
long hiver à hiver désolé
avec les fuites à
l' intérieur de la maison
et votre humilité omniprésente,
battant
le grain grossier de la pauvreté
comme si vous aviez
distribué
une rivière de diamants.

Aie! Maman, comment pourrais-je
vivre sans me souvenir de toi à
chaque minute?
Ce n'est pas possible. Je porte
votre Marverde dans mon sang,
le nom de famille du pain qui est distribué,
de ces mains douces
qui coupaient
le slip de mon enfance dans le sac de farine ,
dont il cuisinait, repassait, lavait,
semait, calmait la fièvre,
et quand tout C'était fait,
et je pouvais déjà
tenir les pieds en sécurité,
c'était
terminé, sombre,
jusqu'au petit cercueil
où pour la première fois il était au ralenti
sous la pluie battante de Temuco.

Montage sonore de la Mamadre.

FOUR POEMS / QUATRE POEMES

Samuel Beckett (1906-1989)

1. Dieppe
again the last ebb
the dead shingle
the turning then the steps
toward the lighted town

2.
my way is in the sand flowing
between the shingle and the dune
the summer rain rains on my life
on me my life harrying fleeing
to its beginning to this end
my peace is there in the receding mist
when I may cease from treading these long shifting thresholds
and live the space of a door
that opens and shuts

3.
what would I do without this world faceless incurious
where to be lasts but an instant where every instant
spills in the void the ignorance of having been
without this wave where in the end
body and shadow together are engulfed
what would I do without this silence where the murmurs die
the pantings the frenzies toward succour towards love
without this sky that soars
above it's ballast dust
what would I do what I did yesterday and the day before
peering out of my deadlight looking for another
wandering like me eddying far from all the living
in a convulsive space
among the voices voiceless
that throng my hiddenness

4.
I would like my love to die
and the rain to be falling on the graveyard
and on me walking the streets
mourning the first and last to love me



1. Dieppe
à nouveau le dernier reflux
des bardeaux morts
le tournant puis les marches
vers la ville éclairée

2.
mon chemin est dans le sable qui coule
entre les galets et les dunes
la pluie d'été pleut sur ma vie
sur moi ma vie harrying fuyant
à son début pour y mettre fin

ma paix est là dans la brume qui recule
quand je peux cesser de fouler ces longs seuils changeants
et vivez l'espace d'une porte
qui s'ouvre et se ferme

3.
que ferais-je sans ce monde sans visage incurable
où durer mais un instant où l'instant ébène
déborde dans le vide l'ignorance d'avoir été
sans cette vague où au fond le
corps et l'ombre sont engloutis
que ferais-je sans ce silence où le murmures meurent
haletants frénésie vers le secours vers l'amour
sans ce ciel qui plane
au-dessus de la poussière de ballast

que ferais-je ce que j'ai fait hier et la veille avant de
regarder hors de mon impasse à la recherche d'un autre
errant comme moi tourbillonnant loin de tous les vivants
dans un espace convulsif
parmi les voix sans voix
qui se pressent ma cachette

4.
J'aimerais que mon amour meure
et que la pluie tombe sur le cimetière
et que je marche dans les rues en
pleurant le premier et le dernier à m'aimer



Montage sonore de Four poems.


STYLE / LE STYLE

Charles Bukowski (1920-1994)

Style is the answer to everything.
A fresh way to approach a dull or dangerous thing
To do a dull thing with style is preferable to doing a dangerous thing without it
To do a dangerous thing with style is what I call art

Bullfighting can be an art
Boxing can be an art
Loving can be an art
Opening a can of sardines can be an art

Not many have style
Not many can keep style
I have seen dogs with more style than men,
although not many dogs have style.
Cats have it with abundance.

When Hemingway put his brains to the wall with a shotgun,
that was style.
Or sometimes people give you style
Joan of Arc had style
John the Baptist
Jesus
Socrates
Caesar
García Lorca.

I have met men in jail with style.
I have met more men in jail with style than men out of jail.
Style is the difference, a way of doing, a way of being done.
Six herons standing quietly in a pool of water,
or you, naked, walking out of the bathroom without seeing me.”

.

Style is the answer to everything.
A fresh way to approach a dull or dangerous thing
To do a dull thing with style is preferable to doing a dangerous thing without it
To do a dangerous thing with style is what I call art

Bullfighting can be an art
Boxing can be an art
Loving can be an art
Opening a can of sardines can be an art

Not many have style
Not many can keep style
I have seen dogs with more style than men,
although not many dogs have style.
Cats have it with abundance.

When Hemingway put his brains to the wall with a shotgun,
that was style.
Or sometimes people give you style
Joan of Arc had style
John the Baptist
Jesus
Socrates
Caesar
García Lorca.

I have met men in jail with style.
I have met more men in jail with style than men out of jail.
Style is the difference, a way of doing, a way of being done.
Six herons standing quietly in a pool of water,
or you, naked, walking out of the bathroom without seeing me.”

Style dit par Charles Bukowski lui-même. Il est connu sous ses pseudonymes divers : Hank, Buk, Henry Chinaski, ce dernier étant celui de son alter ego dans ses nombreux romans autobiographiques. Il est l'auteur, en prose comme en vers, d'une œuvre poétique considérable.


¿QUE LES QUEDA POR PROBAR A LOS JOVENES ? / QUE RESTE-T-IL AUX JEUNES ?

Mario Benedetti (1920-2009)


¿Qué les queda por probar a los jóvenes
en este mundo de paciencia y asco?
¿sólo grafitti? ¿rock? ¿escepticismo?
también les queda no decir amén
no dejar que les maten el amor
recuperar el habla y la utopía
ser jóvenes sin prisa y con memoria
situarse en una historia que es la suya
no convertirse en viejos prematuros

¿qué les queda por probar a los jóvenes
en este mundo de rutina y ruina?
¿cocaína? ¿cerveza? ¿barras bravas?
les queda respirar / abrir los ojos
descubrir las raíces del horror
inventar paz así sea a ponchazos
entenderse con la naturaleza
y con la lluvia y los relámpagos
y con el sentimiento y con la muerte
esa loca de atar y desatar

¿qué les queda por probar a los jóvenes
en este mundo de consumo y humo?
¿vértigo? ¿asaltos? ¿discotecas?
también les queda discutir con dios
tanto si existe como si no existe
tender manos que ayudan / abrir puertas
entre el corazón propio y el ajeno /
sobre todo les queda hacer futuro
a pesar de los ruines de pasado
y los sabios granujas del presente.

Que reste-t-il aux jeunes
dans ce monde de patience et de dégoût?
Juste du graffiti? Roche? scepticisme?
Il leur reste aussi à ne pas dire amen, à
ne pas laisser l'amour les tuer, à
retrouver la parole et l'utopie, à
être jeunes sans hâte et avec mémoire, à se
situer dans une histoire qui leur appartient, à
ne pas devenir des vieillards prématurés.

Que reste-t-il aux jeunes
dans ce monde de routine et de ruine?
Cocaïne? Bière? Barra bravas?
Ils sont partis respirer, ouvrir les yeux,
découvrir les racines de l'horreur,
inventer la paix, même s'ils sont crevés, se réconcilier
avec la nature
et avec la pluie et la foudre,
et avec le sentiment et la mort,
cette folle à lier et à dénouer.

Que reste-t-il aux jeunes
dans ce monde de consommation et de fumée?
Vertige? Des agressions? Les boites de nuit?
Ils doivent aussi discuter avec Dieu,
qu'il existe ou non,
tendre la main, ouvrir des portes
entre leur propre cœur et celui des autres.

Surtout, ils doivent encore faire un avenir
malgré les ruines du passé
et les sages coquins du présent.

¿Qué les queda por probar a los jóvenes ?dit par l'auteur lui-même. Poète, mais aussi nouvelliste, essayiste, romancier et dramaturge, Mario Benedetti est considéré comme l'un des écrivains les plus importants en langue espagnole par la critique littéraire, et est aussi l'un des écrivains latino-américains les plus universels du xxe siècle.

VERSI DEDICATI A MARYLIN MONROE / VERS DÉDIÉS A MARYLIN MONROE

Pier Paolo Pasolini (1922-1975) 

Del mondo antico e del mondo futuro
epoque rimasta solo la bellezza, e tu,
povera sorellina minore,
quella che corre dietro i fratelli più grandi,
e ride e piange con loro, per imitarli,
tu sorellina più piccola,
quella bellezza l'avevi addosso umilmente,
e la tua anima di figlia di piccola gente,
non ha mai saputo di averla,
perché altrimenti non sarebbe stata bellezza.

Il mondo te l'ha insegnata,
cosi la tua bellezza divenne sua.
Del pauroso mondo antico e del pauroso mondo futuro
ère rimasta sola la bellezza, e tu
te la sei portata dietro come un sorriso obbediente.
L'obbedienza richiede troppe lacrime inghiottite,
il darsi agli altri, troppi allegri sguardi
che chiedono la loro pietà! Così
ti sei portata via la tua bellezza.

Sparì come un pulviscolo d'oro.
Dello stupido mondo antico
e del feroce mondo futuro
ère rimasta una bellezza che non si vergognava
di alludere ai piccoli seni di sorellina,
al piccolo ventre così facilmente nudo.
E per questo era bellezza, la stessa
che hanno le dolci ragazze del tuo mondo…
le figlie dei commercianti
vincitrici ai concorsi a Miami oa Londra.

Sparì come una colombella d'oro.

Il mondo te l'ha insegnata,
e cosi la tua bellezza non fu più bellezza.
Ma tu continuavi a essere bambina,
sciocca come l'antichità, crudele come il futuro,
e fra te e la tua bellezza posseduta dal Potere
si mise tutta la stupidità e la crudeltà del presente.
La portavi sempre dietro come un sorriso tra le lacrime,
impudica per passività, indecente per obbedienza.

Sparì come una bianca colomba d'oro.
La tua bellezza sopravvissuta dal mondo antico,
richiesta dal mondo futuro, posseduta
dal mondo presente, divenne un male mortale.

Ora i fratelli maggiori, finalmente, si voltano,
smettono per un momento i loro maledetti giochi,
escono dalla loro inesorabile distrazione,
e si chiedono: «E 'possibile che Marilyn,
la piccola Marilyn, ci abbia indicato la strada? ”

Ora sei tu,
quella che non conta nulla, poverina, col suo sorriso,
sei tu la prima oltre le porte del mondo
abbandonato al suo destino di morte.




En pleine mer où je suis né
Trois lieues au large.

Du monde antique et du monde futur
n’était resté que la beauté, et toi,
pauvre petite sœur cadette,
celle qui court derrière ses frères aînés,
et rit et pleure avec eux, pour les imiter,
et se met leurs écharpes,
touche en cachette leurs livres, leurs canifs,

toi petite sœur la plus jeune de toutes,
cette beauté tu la portais humblement,
avec ton âme de fille du petit peuple,
tu n’as jamais su que tu l’avais,
parce que autrement ça n’aurait pas été de la beauté.
Elle a disparu, comme une poussière d’or.

Le monde t’en a donné conscience.
Ainsi ta beauté est devenue sienne.

Du stupide monde antique
et du féroce monde futur,
était resté une beauté qui n’avait pas honte
de faire allusion aux petits seins de la petite sœur,
au petit ventre si aisément dénudé.
Et c’est pourquoi c’était de la beauté, celle-là même
qu’ont les douces mendiantes noires,
les gitanes, les filles de commerçants
qui gagnent les concours de beauté, à Miami ou à Rome.
Elle a disparu, comme une colombe d’or.

C’est le monde qui t’en a donné conscience,
et ainsi ta beauté a cessé d’être beauté.

Mais tu continuais à être enfant,
idiote comme l’Antiquité, cruelle comme l’avenir,
et entre toi et ta beauté accaparée par le pouvoir
se sont mises toute la stupidité et la cruauté du présent.
Tu l’emportais, comme un sourire entre les larmes,
impudique par passivité, indécente par obéissance.
L’obéissance exige bien des larmes qu’on ravale.
Et de se donner aux autres regards trop gais,
qui demandent leur pitié.
Elle a disparu comme une blanche ombre d’or.

Ta beauté, survivante du monde antique,
exigée par le monde futur, accaparée
par le monde présent, devint ainsi un mal.

Maintenant les grands frères se tournent enfin,
arrêtent un instant leurs maudits jeux,
sortent de leur inexorable distraction,
et se demandent : « Se peut-il que Marilyn,
la petite Marilyn nous ait indiqué la voie ? » Maintenant c’est toi,
la première, toi la plus petite des sœurs, celle
qui ne compte pour rien, pauvre petite, avec son sourire,
c’est toi la première au-delà des portes du monde
abandonné à son destin de mort.

Versi dedicati a Marylin Monroe dit par Laura Betti (1927-2004), actrice de cinéma et chanteuse. Elle fut l'égérie de Pier Paolo Pasolini, pour lequel elle travaille à plusieurs reprises (Théorème lui vaut le prix d'interprétation à la Mostra de Venise en 1968).


DUST IN THE WIND

Steve Walsh (né en 1951) and / et Kansas

I close my eyes, only for a moment, and the moment's gone
All my dreams, pass before my eyes, a curiosity
Dust in the wind, all they are is dust in the wind.
Same old song, just a drop of water in an endless sea
All we do, crumbles to the ground, though we refuse to see
Dust in the wind, all we are is dust in the wind
Don't hang on, nothing lasts forever but the earth and sky
It slips away, and all your money won't another minute buy.
Dust in the wind, all we are is dust in the wind
Dust in the wind, everything is dust in the wind.

  Je ferme les yeux, que pour un moment, puis le moment est parti
  Tous mes rêves défilent devant mes yeux, quelle curiosity
  Poussière dans le vent, voilà  ce qu'ils sont
  C'est la même chanson, une simple goutte d'eau dans un océan
  Tout ce que l'on fait retourne à  la terre, qu'on le voit ou qu'on refuse de le faire
  Poussière dans le vent, nous ne sommes que de la poussière dans le vent
  Ne te raccroche à rien, car rien ne dure éternellement sauf la terre et le ciel
  Le temps passe, et tout ton n'argent ne pourrait acheter une seule minute de plus
  Poussière dans le vent, nous ne sommes que de la poussière dans le vent
Poussière dans le vent, tout n'est que de la poussière dans le vent


Once carried through the current and being swept away
The king is in the closet, he's hiding from today
And though he owns all fortunes, this room is where he'll stay
And his world is filled with darkness, turning grey

Gazing out the window of the 42nd second floor
He is separate from all others, no one knocks upon his door
And it might as well be raining 'cause the sunlight hurts his eyes
And his ears will never hear the children's cries

Once proud and full of passion, he fought the cause of man
Many people loved his courage, many followed his command
He changed the old into the new and the course of things to come
And then one day they noticed he was gone

At first it didn't matter, nobody seemed to care
They all became too busy to find him anywhere
So no one knew, not even him, the problems he would find
On the day he journeyed deep into his mind

I close my eyes I go far away, away from this battlefield
In my dreams, well, here I will enjoy it
Where innocence plays with all the laughing children
The kind who are crying right now

A taste of freedom from the pain of everything here I see
Life is sweet but I took it all for granted
And now I don't know if I can even tell you
Just what we permit, we allow

Allow me to forget the life I've made my own
I've held this nation in my hand and yet it's not my home
Allow me just one answer and one reason why
Why this refugee of the family of man must die, tell me why

Daydreams filled his nighttimes and night dreams filled his days
Confusion and uncertainty, a puzzled mind of haze
You thought he was so powerful and set upon his ways
Well, he left us all to follow through this maze

I heard the king was dying, I heard the king was dead
And with him died the chronicles that no one ever read
The closet's fully empty now, it's occupied by none
I'll draw the drapes, now destiny is done.

Une fois porté par le courant et être balayé
Le roi est dans le placard, il cache à partir d'aujourd'hui
Et bien qu'il possède toutes les fortunes, cette chambre est l'endroit où il va
rester
Et son monde est rempli de ténèbres, grisonnants

Contemplant par la fenêtre du deuxième étage 42e
Il est séparé de tous les autres, personne ne frappe à sa porte
Et il pourrait aussi bien être pleut parce que la lumière du soleil fait mal
ses yeux
Et ses oreilles ne seront jamais entendre les cris des enfants

Une fois fier et plein de passion, il a combattu la cause de l'homme
Beaucoup de gens ont aimé son courage, beaucoup ont suivi son commandement
Il a changé l'ancien dans le nouveau et le cours des choses à
viens
Et puis un jour, ils ont remarqué qu'il était parti

Au début, il n'a pas d'importance, personne ne semblait se soucier
Ils sont tous devenus trop occupé pour le trouver nulle part
Donc, personne ne savait, pas même lui, les problèmes qu'il trouverait
Le jour, il se rendit profondément dans son esprit.

Je ferme les yeux, je vais loin, loin de ce champ de bataille
Dans mes rêves, eh bien, ici, je vais en profiter
Où l'innocence joue avec tous les enfants qui rient
Le genre qui pleure en ce moment

Un avant-goût de la liberté de la douleur de tout ce que je vois ici
La vie est douce, mais je l'ai pris tout pour acquis
Et maintenant, je ne sais pas si je peux même vous dire
Tout ce que nous permettons, nous permettons

Permettez-moi d'oublier la vie que je l'ai fait ma propre
J'ai tenu cette nation dans ma main et pourtant ce n'est pas ma maison
Permettez-moi juste une réponse et une raison pour laquelle
Pourquoi ce réfugié de la famille de l'homme doit mourir, dites-moi pourquoi

Daydreams rempli ses nighttimes et les rêves nocturnes remplis son
journées
La confusion et l'incertitude, un esprit perplexe de brume
Vous pensiez qu'il était si puissant et mis sur ses voies
Eh bien, il nous a tous laissé à suivre à travers ce labyrinthe

J'ai entendu le roi était en train de mourir, j'ai entendu le roi était mort
Et avec lui sont morts les chroniques que personne n'a jamais lu
Le placard est entièrement vide maintenant, il est occupé par aucune
Je tire les rideaux, maintenant destin est fait.

Dust in the wind & Closet chronicles écrites et composées (chantées) par Steve Walsh et Kerry Livgren. Le groupe américain était composé,à sa création en 1974, de Rich Williams, guitare, Dave Hope, basse, Robbie Steinhardt, violon et chant, Kerry Livgren, guitare et clavier,Phil Ehart, batterie.


Քաղաքը / LA VILLE

Violette Krikorian (née en 1962)

"(...)L'ermite chauve du seizième étage a tiré la chasse d'eau, puis éteint la lumière.
C'est alors, qu'avalé par l'obscurité, glougloutant à gros bouillons, déboule et déborde, d'étage en étage déboule, et de maison déboule en maison l'excrément de toutes les Excrétions, le sperme par masturbation, le repas putride, le mot indicible, la vomi d'ivrogne, le sang menstruel, le chaton mort-né, le nom qu'on ne prononce pas, le secret du chauve... D'étage en étage, ça déboule, de maison en maison, d'une chute à une autre chute, d'un gouffre à un autre gouffre, glougloutant bouillonnant déboule, emprunte le réseau des canalisations, se répand sous la Ville, fait éclater les bubons du crâne lisse et pelé de la nuit (...)"

Քաղաքը dit par Violette Krikorian elle-même.

J'espère que vous avez fait un excellent voyage ! Nous vous en proposons un autre, tout aussi riche et fertile en découvertes poétiques, en cliquant sur l'image ci-dessous :

thumbshot_310614520

.


Site créé gratuitement grâce à OnlineCreation.me